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3° SEMINAIRE INTERNATIONAL DU VATICAN


Pratiquer la charité chrétienne

Gianni Gola *

Comme je ne dirige pas une association sportive catholique, mais plutôt une association sportive militaire laïque, certains pourraient se demander pourquoi je participe à ce panel sur les possibilités qu'offre le sport pour promouvoir des valeurs chrétiennes telles que la paix, la charité et la solidarité. Permettez-moi de m'expliquer. Ma propre expérience sportive - celle de l'athlétisme - a été nourrie par ma participation à la " Flamme jaune ", l'association sportive militaire italienne de la " surveillance des finances " qui est une branche des forces armées italiennes. Après avoir terminé ma carrière d'athlète, j'ai pu continuer à faire du sport par l'intermédiaire de l'armée italienne. Au fil des ans, ma mission dans le monde du sport a, à plus d'une reprise, croisé ma vie de foi. Elle m'a notamment offert des rencontres inoubliables avec le Serviteur de Dieu, Jean-Paul II.

Alors que j'étais président du comité régional de la Fédération italienne d'athlétisme (FIDAL), j'ai assisté au "Jubilé pour le sport" pendant l'Année Sainte 1984 présidée par le Pape Jean-Paul II au stade olympique de Rome. Des années plus tard, au cours du grand jubilé de l'an 2000, en tant que membre du Comité national du Comité national olympique italien (CONI) et président du Conseil international du sport militaire (CISM), j'ai pu vivre les deux jours d'un autre "Jubilé du sport" en compagnie de ce pape sportif. Bien que j'aie assisté à ces événements en représentation des fonctions que j'occupais au sein du monde séculier du sport, j'étais également présent en tant que catholique et ancien athlète. Voir de mes propres yeux l'enthousiasme de Jean-Paul II pour ce monde du sport, et la réciprocité des athlètes pour ce geste concret de la part du Saint-Père est quelque chose dont je me souviendrai toujours et que je chérirai.

Ma carrière sportive militaire m'a également amené à la responsabilité que j'occupe maintenant, celle de président du CISM. Fondé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec quelques pays des forces alliées, ce Conseil militaire international est aujourd'hui l'une des plus grandes organisations sportives multidisciplinaires au monde et porte la devise unique sous laquelle nous opérons : "l'amitié par le sport". Nous organisons diverses manifestations sportives pour les forces armées de nos 131 pays membres. Les soldats, qui se rencontraient auparavant sur le champ de bataille, se rencontrent maintenant en toute amitié sur le terrain de jeu. Notre but ultime est de contribuer à la paix mondiale en unissant les forces armées du monde entier par le sport.

C'est donc la première raison de ma participation à cette table ronde : vous dire que la paix - une forme très concrète de charité chrétienne - peut être promue par le sport. Comme on peut le lire dans Gaudium et Spes (n.61), l'activité sportive "contribue à établir des relations fraternelles entre les hommes de toutes conditions, nations et races". 1

C'est pourquoi je dois partager un autre souvenir affectueux du Pape Jean-Paul II : sa rencontre avec le CISM le 7 septembre 1995, à l'occasion des premiers Jeux Mondiaux Militaires qui se tenaient à Rome. Dans une salle Paul VI bondée, le Saint-Père nous a dit : "La participation de plus de 4.000 jeunes athlètes militaires de plus de 100 pays de tous les continents donne à cet événement un sens qui dépasse de loin la compétition sportive elle-même et devient une rencontre de peuples qui, à travers le sport, désirent envoyer un puissant message de paix au monde... Je suis heureux de constater que vos manifestations sportives sont une nouvelle forme de dialogue entre les militaires du monde, une pédagogie en quelque sorte qui crée une culture de la paix. " 2

L'une des béatitudes n'est-elle pas "Heureux les artisans de paix, ils seront appelés enfants de Dieu" ( Mt 5, 3 ) ? Ainsi, dans la mesure où les activités d'une association sportive comme le CISM ou celles d'une institution catholique favorisent le respect et l'amitié, elles collaborent à la promotion des vertus chrétiennes de paix, de réconciliation et de compréhension mutuelle.


Pourtant, il existe encore une autre "opportunité chrétienne" implicite dans le sport, notamment en ce qui concerne le vaste réseau d'associations sportives nationales et internationales, que je voudrais mentionner. Je veux parler du concept chrétien de solidarité. Avec son réseau, sa main-d'œuvre, ses infrastructures et sa capacité d'initiative, les semaines du CISM doivent apporter une contribution significative en termes de solidarité qui puisse bénéficier tout particulièrement aux pays qui en ont le plus besoin. Un exemple simple de cette solidarité se trouve dans un récent projet du CISM intitulé "Aide au sport militaire", qui a débuté il y a quelques années lorsque l'association sportive militaire " la flamme jaune " a collecté et expédié, au moyen de ses propres transports militaires, du matériel sportif et d'autres aides humanitaires à la République africaine du Burkina Faso pour être distribués aux enfants nécessiteux. Aujourd'hui, de plus en plus d'actions de solidarité sont organisées par nos pays membres, dans le but de mettre en commun des ressources et des efforts concrets au profit des pays membres moins avancés.

Si des efforts sont déployés par le CISM, vous savez tous que l'Église catholique est un réseau mondial par excellence. Ses associations sportives internationales et nationales offrent d'excellentes possibilités de partager des idées, des ressources et d'autres types d'aide humanitaire avec nos frères et sœurs qui sont dans le besoin. En fait, on m'a dit que l'association catholique Centre Sportif Camerounais, représentée dans cette table ronde par Francis Kammogne, a vu le jour grâce à la généreuse collaboration et à l'aide de l'association catholique du Centre Sportif Italien. J'espère que ces exemples pourront vous motiver tous à réaliser de plus en plus de projets de solidarité et de charité chrétienne au sein de vos organisations.

Permettez-moi un dernier mot sur la section "Église et sport" du Vatican. Je suis les activités de ce bureau avec beaucoup d'intérêt depuis que j'ai rencontré le père Lixey lors d'un congrès à Macolin en Suisse pendant l'"Année de l'éducation et du sport" des Nations unies. J'ai été heureux d'apprendre que le Saint-Siège a créé cette section comme une sorte d'observatoire du monde du sport. De plus, je crois que le monde du sport a besoin d'une institution qui soit " super partes " et qui parle d'une voix morale reconnue - celle du Saint-Père. C'est pourquoi je suis heureux de pouvoir participer à cette table ronde et je tiens à remercier le Conseil pontifical pour les laïcs de m'avoir donné l'occasion de "collaborer" de cette manière au pontificat du pape Benoît XVI.

* Général de division de la "
surveillance des finances " des forces armées italiennes et ancien commandant

1 Concile Vatican II, Gaudium et Spes, n.61.

2 Jean-Paul II, Discours aux participants des premiers jeux militaires mondiaux, 7 septembre 1995.