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TEMOIGNAGE DE SPORTIF DE HAUT NIVEAU
ANDREA JAEGER

               Du tennis à la vie religieuse

Andrea Jaeger (née le 4 juin 1965 à Chicago, Illinois) est une joueuse de tennis américaine, devenue religieuse anglicane en 2006.

Andrea Jaeger joue ses premiers tournois dès 1979, à quatorze ans, et débute sa carrière professionnelle en janvier 1980. Elle pratique un solide jeu de fond de court basé notamment sur un coup droit à plat très pur et un revers à deux mains qui lui permettent d'exploiter tous les angles du terrain avec des variations permanentes. Elle devient rapidement numéro deux mondiale au classement WTA en battant les toutes meilleures, dont Martina Navrátilová (à quatre reprises mais jamais en Grand Chelem) et Chris Evert (par trois fois dont Roland-Garros en 1982).

Elle atteint la finale de Roland-Garros en 1982 et celle de Wimbledon en 1983, chaque fois dominée par Martina Navrátilová. Elle est aussi demi-finaliste à l'US Open en 1981 et 1982 et à l'Open d'Australie en 1982.

Associée à Jimmy Arias, elle remporte Roland-Garros en double mixte en 1981, son unique succès dans une épreuve du Grand Chelem.

Après des résultats en demi-teinte en 1984, une blessure à l'épaule la contraint à mettre un terme à sa carrière en 1985, à seulement 19 ans.

Andrea Jaeger a gagné huit tournois WTA en simple, concédant quelque 25 finales (dont dix face à Navrátilová et dix face à Evert). Elle compte aussi quatre victoires en double dames.

Depuis 1990, Andrea Jaeger se consacre à la Little Star Foundation, qui intervient en faveur des enfants atteints de leucémie. Elle en est un des fondateurs, et a consacré à l'érection de cette fondation ses gains de joueuse professionnelle, soit 1,5 million de dollars. Elle fait construire un ranch à Aspen, dans le Colorado, où elle accueille des dizaines d’enfants en fin de vie. La fondation s'appuie sur le soutien de plusieurs autres célébrités : les joueurs de tennis John McEnroe, Pete Sampras et l'ancien mannequin Cindy Crawford.

En septembre 2006, à 41 ans, elle devient religieuse dans l'ordre dominicain au sein de l'église épiscopalienne sous le nom de « sœur Andrea ». Cindy Crawford, qui fait partie de ses intimes, a été la première informée de son choix. Croyante de longue date, cette fille d'immigrants européens – son père né en Suisse et sa mère allemande se sont installés aux États-Unis dans les années 1950 – a toujours senti que « Dieu avait un plan pour [elle] », y compris quand elle jouait au tennis.

               témoignage :

Comme chaque année, Sœur Andrea aura passé Noël avec des enfants malades atteints du cancer. Depuis une vingtaine d’années, elle a fait don de sa vie à ces jeunes êtres qui souffrent et qui, pour la plupart d’entre eux, n’ont aucune chance de s’en sortir.

Longtemps, elle a été une simple militante au cœur d’une fondation qu’elle avait elle-même créée avant d’être emportée par sa propre cause jusqu’à ce 16 septembre 2006 où elle est devenue, à 41 ans, Sœur Andrea au sein d’une église dominicaine aux Etats-Unis. Ce choix s’est imposé à elle, a-t-elle déclaré, par le biais d’une révélation apparue au cours d’un rêve: «Je visitais un monastère en compagnie de Catherine de Sienne dont la mission était d’aider les pauvres et les malades.»

L’histoire de Sœur Andrea est étonnante, d’aucuns diront même extraordinaire quand on se rappelle qui elle était bien longtemps avant de mettre le voile voilà quatre ans. Andrea était l’une des meilleures joueuses de tennis au monde. En 1982, elle avait atteint la finale de Roland-Garros et en 1983 celle de Wimbledon, Martina Navratilova la dominant dans les deux cas.

Non, les amateurs de tennis d’il y a 30 ans n’ont pas oublié Andrea Jaeger et ses célèbres couettes. A l’époque, elle était un prodige destiné aux plus grandes victoires. Dans l’histoire du tennis professionnel, jamais aucune joueuse avant elle n’avait été aussi précoce. A 14 ans et huit mois, elle était déjà 19e mondiale. A l’issue de sa première saison parmi les professionnelles, elle était 7e. En août 1981, elle s’invite au 2e rang mondial, troublant la célèbre rivalité entre Chris Evert et Martina Navratilova.

Andrea Jaeger avait un sacré caractère. Elle était une sorte de petite sœur de John McEnroe. Sa mine était toujours renfrognée et elle avait l’insolence de son âge. Elle n’avait clairement aucun respect pour ses glorieuses aînées qui devaient être ses victimes. Cette adolescente, qui ne souriait guère, n’avait pas froid aux yeux. Quelques minutes après sa défaite en finale à Roland Garros, en 1982, elle attaqua Martina Navratilova bille en tête lors de la conférence de presse en l’accusant de coaching, c’est-à-dire d’avoir reçu, par le biais de gestes, des conseils techniques pendant le match de la part de Renee Richards, l’entraîneur de Navratilova à l’époque, ce qui est interdit par le règlement.

Andrea Jaeger paraissait en tension permanente. Son père, Roland, un maçon suisse qui fut boxeur et avait émigré à Chicago en 1956, la maintenait sous pression, il est vrai. Roland Jaeger, un personnage brutal et impopulaire sur le circuit féminin. L’un de ces géniteurs tellement répandus dans le tennis féminin qui voient leur progéniture avant tout comme une possible poule aux œufs d’or.

L’aventure sportive d’Andrea Jaeger bascule sur le central de Roland Garros en 1984 alors qu’elle n’avait que 19 ans. En frappant un revers lors de son match du premier tour contre Jamie Golder, une autre Américaine, elle se blesse violemment à l’épaule, abandonne le match et arrête sa carrière. Un total de sept opérations n’allait pas réussir à régler son problème. Elle avouera plus tard: «Cette blessure a été la plus belle chose qui me soit arrivée. C’est le choix de Dieu qui m’a guidée vers les enfants malades.»

La cause enfantine était déjà au cœur de ses préoccupations avant cette blessure, mais ses obligations professionnelles l’avaient empêchée de s’investir comme elle l’aurait voulu. Elle raconte:

    «Un jour, alors que j’étais toujours joueuse professionnelle, dans le cadre d’un tournoi, j’étais allée offrir des jouets à des enfants malades dans un hôpital. Il y avait là un petit garçon qui n’avait plus de mains et me défiait à des jeux vidéo. Et moi qui avais besoin de mes mains pour jouer, j’ai eu le sentiment de recevoir avec lui une leçon de vie. Il y avait également une petite fille rendue chauve par une chimiothérapie. Elle s’est saisie de mes couettes et elle m’a dit que je devais avoir les pires difficultés pour entretenir une aussi longue chevelure. Ce jour-là, je me suis fait une promesse qu’une fois ma carrière terminée, toute ma vie servirait à venir en aide à de tels enfants.»

Le destin a donc précipité ce vœu. Après avoir dédié tous ses gains de joueuse -1,5 million de dollars- à la création de sa fondation, elle est allée encore plus loin en offrant tout à sa cause, à commencer donc par elle-même.

Après sa blessure, ses relations avec son père étaient devenues exécrables. Andrea Jaeger finira même par couper les ponts avec lui, ce qu’elle regrettera évidemment lorsque celui-ci mourut prématurément. «Mais nous avions fait la  paix avant son départ», a indiqué cette inlassable visiteuse d’hôpitaux qui a même fait construire un ranch à Aspen, dans le Colorado, où elle accueille des dizaines d’enfants en fin de vie. Elle poursuit sa tâche, aidée par des donateurs comme Andre Agassi, Monica Seles ou l’ancien top model, Cindy Crawford, devenue l’une de ses proches.