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Retour TEMOIGNAGE DE SPORTIF DE HAUT NIVEAU Trois fois en tête du Grand Raid ! Adepte de sensations fortes, passionné de sport et guide de montagne, François Breitler a embrayé tôt les faces mythiques les unes après les autres : face sud du Fou, Pilier Bonatti aux Drus ; et l'Eiger, le Cervin, les Jorasses, la face nord du Liskamm en solo ... jusqu'à un grave accident d'alpinisme dans les Alpes valaisannes. "J'étais guide depuis plusieurs années déjà. En été, je faisais surtout des 4000 m avec des privés, et aussi pour des bureaux de guides comme Zermatt ou Chamonix. J'étais aussi engagé à l'année par le Club alpin suisse (CAS), j'étais chef Organisation Jeunesse. C'était cool : je pouvais faire le programme que je voulais, il y avait une bande de jeunes qui grimpaient fort, avec lesquels je pouvais faire des trucs super dur en falaise." Mais il y a cette chute collective dans la face nord de Lenzspitze, en 1997, qui laisse un moniteur Jeunesse et Sport Suisse alpinisme invalide. Cette avalanche aussi qui emporte l'un de ses clients, au Canada. Alors lentement mais sûrement, François commence à se sentir mal dans sa vie. Physiquement, un genou droit opéré plusieurs fois ne le laisse pas tranquille. Psychologiquement, il se sent glisser dans un cul-de-sac sans issue. Il fume des joints régulièrement, une pratique très répandue dans les sports de l'extrême. " C'est à ce moment que je me suis souvenu de mon éducation chrétienne. J'ai crié à Dieu de me venir en aide ! Et la montagne m'a permis de le rencontrer, parce que chaque sortie dans ce cadre immense m'a amené à me remettre en question. La montagne, c'est une partie de la création qui nous aide à comprendre l'envergure du Créateur. " Sur conseil de son médecin, il commence à pédaler pour remuscler doucement son genou ... " Je n'ai jamais pu retrouver mon niveau en escalade et mon genou s'enflamme à chaque fois que j'insiste un peu, alors qu'il supporte beaucoup mieux le pédalage, explique-t-il. J'ai donc investi de plus en plus ce nouveau sport et préparé des courses de type alpin de longue distance avec un aspect technique orienté enduro " Même s'il se destine au fil des ans vers des parcours plus techniques comme la Transvésubienne ou l'Ultra Raid de la Meije en France, voire même des enduros et des centes marathons, il participe en 2012 pour la 5° fois au Grand Raid Verbier-Grimentz. " Un sentiment d'inachevé et une attirance toujours plus importante au fil de la saison m'ont poussé à m'inscrire quand même à cette course mythique en Suisse romande, pour essayer de décricher une 3° victoire dans la catégorie des plus de 40 ans. " Ce jour là, au coup de pistolet du départ de la course, François part avec le groupe de tête, sachant qu'il doit faire très attention à ne pas se "mettre dans le rouge", ce qui lui coûterait cher par la suite. Après environ 3 km, le groupe se scinde en deux et il reste sagement derrière. Arrivé à la Croix de Coeur, sommet de la 1° montée, il prend le commandement du groupe pour avoir le champ libre à la descente. Dès les 1° épingles, il prend le large pour parvenir, au abs de la descente, à rattraper deux coureurs du 1° groupe qui se sont fait lâcher. Il doit alors pointer aux alentours de la 25° position. Il lui faut maintenant gérer au mieux les 6 heures de course qu'il lui reste à faire. Il roule en accordéon avec les deux personnes qu'il a rattrapées : elles le distancent dans les montées, et il revient systématiquement dans les descentes. " En arrivant à Evolène, après un peu plus de 4 heures de course et après une longue descente, je m'attendais à devoir composer avec les premières crampes, ce qui est arrivé comme prévu. Je moulinais alors avec un minimun de pression sur les pédales, jusqu'à ce que mes jambes se remettent à travailler normalement. " Jusqu'à Eison, il réussit encore à bien gérer l'effort. Après la longue montée vers le Pas de Lona, il ne reste plus que la dernière montée peu raide pour parvenir au Basset de Lona, et enfin basculer sur le barrage de Moiry et descendre sur Grimentz. Une fois qu'il a passé la ligne d'arrivée après 7 heures 28 de course, c'est une gamme d'émotions très puissantes qui l'envahissent ... Il est le premier de sa catégorie pour la troisième fois, et 22° au classement général ! Professionnellement, François Breitler a eu l'opportunité d'être engagé comme éducateur dans une fondation d'aide aux toxicomanes. "Je me sens bien dans cette fonction. J'essaie de faire profiter de mon expérience des personnes ravagées par la vie." Car les excès, la recherche d'adrénaline, il connaît. Comme aussi les soins que peut prodiguer pour chacun Celui qui a fait la montagne et ses cimes admirables. Le sport, François le considère d'ailleurs maintenant comme un outil magnifique pour se découvrir, se dépasser, se lancer des défis, certes ; mais aussi comme un apprentissage fondamental de la persévérance ; le contraire de "tout, tout de suite" très actuel. tiré de : La bible de la montagne
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