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DISCOURS DE JEAN XXIII
AUX COUREURS DU 47° TOUR D'ITALIE

    Le 30 mai, le Saint Père s'est adressé en ces termes aux coureurs du 47° Tour d'Italie, venus le saluer dans la cour Saint Damase en tenue de coureurs et avec leurs bicyclettes :

Très chers coureurs du Tour d'Italie, et vous tous, organisateurs, promoteurs, suiveurs de la grande compétition cycliste, Nous sommes heureux et reconnaissant de votre visite. C'est une étape qui Nous rappelle l'intérêt passionné avec lequel Nous aussi, dans Notre enfance, Nous suivions le Tour d'Italie, et qui Nous offre l'agréable occasion, non seulement d'évoquer les noms fameux des grands coureurs de jadis, mais encore de connaître vos noms et de Nous informer des péripéties de cette compétition toujours célèbre.

                    Une magnifique discipline personnelle

Nous sommes content d'assister à votre passage à Rome pour deux autres raisons importantes : Nous avons ainsi une nouvelle occasion de manifester Notre sympathie pour tous les sportifs et Notre estime pour le sport. On l'a dit plus d'une fois en des discours amples et autorisés, et, à présent, Nous le répétons à Notre tour : l'Eglise voit dans le sport une gymnastique de l'esprit ; un exercice d'éducation physique et un exercice d'éducation morale, et c'est pourquoi elle admire, approuve, encourage le sport dans ses différentes formes, spécialement le sport organisé - et c'est une nécessité - pour toute la jeunesse en vue du développement harmonieux du corps et de ses énergies, et aussi le sport de compétition, le vôtre, qui comporte l'effort et le risque, à la condition qu'il ne dépasse pas la mesure au-delà de laquelle il pourrait nuire aux fins mêmes du sport, à la santé, à l'intégrité et à l'excellence de la vie physique. L'Eglise admire, approuve et encourage encore davantage le sport si l'exercice des forces physiques s'harmonise avec celui des forces morales, lesquelles peuvent faire du sport une magnifique discipline personnelle, une sévère préparation aux contacts sociaux fondés sur le respect de sa propre parole et de la personne des autres, un principe de cohésion sociale capable aujourd'hui de nouer des relations amicales jusque sur le plan international.

                    Le match de Lima

Tout cela exige que le sport soit dominé par un idéal, par des principes et des règles qui lui infusent vigueur et noblesse, comme c'est votre cas, et qui excluent les excès de risque et de passion, aussi bien chez les athlètes que dans le public qui les observe et s'exalte au spectacle de leur compétition. Comment ne pas rappeler à ce propos avec une immense tristesse les faits lamentables qui se sont produits récemment à Lima ( sous prétexte d'un but refusé lors du match de football Argentine Pérou disputé à Lima le 24 Mai, les spectateurs ses ont livrés à des violences qui ont fait plus de trois cents morts ) ? Faisons en sorte qu'ils ne se renouvellent jamais plus, dans aucune partie du monde et pour aucune catégorie de sport. Aussi, Nous n'en sommes que plus satisfait de votre course cycliste, qui a entre autres le mérite de susciter d'immenses enthousiasmes et de les contenir dans le style d'une bonne éducation civile.

                    La vie est une compétition vers un but surnaturel

Mais il y a une autre raison qui rend joyeux Notre salut : c'est précisément celle qui vous conduit ici. Le sens de votre visite au Pape révèle une intuition que vous avez au fond de vos âmes sans pouvoir peut-être l'exprimer, c'est à dire que le sport, outre qu'il est une réalité sensible et expérimentale, est aussi le symbole d'une réalité spirituelle qui constitue la trame cachée, mais essentielle, de notre vie : la vie est un effort, une compétition, un risque, une course, une espérance vers un but qui dépasse la scène de l'expérience commune, que l'âme entrevoit et que la religion nous présente. Et vous, en venant chez le Pape, vous élevez, peut-être inconsciemment, mais d'une façon voulue, vos âmes vers ces fins suprêmes de la vie qui, dans votre effort sportif, trouvent uns splendide image, et vous exprimez, par votre présence, un désir, une prière d'être capables, d'êtres dignes, non seulement de représenter, mais encore d'atteindre le but final qui est la vraie et suprême destinée de la vie.

C'est très bien, chers fils. Pensez ainsi, désirez ainsi, priez ainsi dans votre coeur. Notre paternelle Bénédiction vous accompagne.