Retour

MESSAGE DU PAPE FRANCOIS
POUR LE CENTENAIRE DU CORRIERE DELLO SPORT-STADIO

                  19 octobre 2024 : 

Chers frères et sœurs,

Tous mes vœux ! Cent ans, c'est un objectif important, un beau trophée à mettre dans son armoire à trophées ! Encore plus grand que celui du tirage de deux millions d'exemplaires vendus à l'occasion de la victoire de l'Italie à la Coupe du monde 2006 ! Vous avez fait un beau parcours au cours de ces cent ans : après tout, parmi ceux qui ont contribué à la naissance du journal, il y avait un certain Enzo Ferrari, qui s'y connaissait en moteurs et en victoires !

Je remercie le directeur Ivan Zazzaroni de m'avoir envoyé une belle lettre évoquant le centenaire du journal, et je suis heureux d'être près de vous en ce jour de fête.

Quand je pense au sport et à ma patrie, l'Argentine, avant même de penser aux grandes installations de football, comme la Bombonera, je pense à l'époque où, enfants, nous jouions au football avec un ballon fait de chiffons. Tant de champions ont commencé de cette façon, en jouant avec des amis de manière insouciante sur des terrains improvisés entre les maisons, même dans des contextes très pauvres. Qu'il est beau d'expérimenter le sens de la fraternité : on joue, et on joue ensemble, et on sait qu'on n'est adversaires que sur le terrain, jamais ennemis. On apprend la joie de la victoire et on connaît la sueur et l'engagement qu'elle a coûté, on apprend aussi de la défaite, en essayant de se relever et en gardant précieusement les erreurs que l'on a commises pour essayer de les surmonter la prochaine fois, ou simplement pour accepter sa diversité et ses limites : nous sommes tous précieux et uniques, mais nous ne sommes pas parfaits.

Certains disent que je suis un fan de San Lorenzo, une équipe argentine : cela reste un secret, mais une chose me semble belle dans l'histoire de cette équipe. Lorsque les garçons qui jouaient dans les rues au début du XXe siècle cherchaient un espace sûr où jouer au football, un prêtre d'origine italienne, un salésien, Don Lorenzo Massa, a ouvert les portes de l'oratoire, et c'est ainsi qu'a commencé une belle aventure. Aujourd'hui aussi, nous avons besoin d'espaces où faire du sport, surtout dans les contextes les plus pauvres et les plus isolés, mais nous avons surtout besoin d'adultes qui accueillent authentiquement les enfants et les jeunes, qui savent écouter leurs rêves, qui veulent avec eux un avenir meilleur. Pensons, même ici en Italie, à tout le bien qui a été fait à travers les camps paroissiaux et oratoires, et à tous les jeunes qui sont aujourd'hui des champions sportifs et qui se souviennent souvent qu'ils sont partis des camps paroissiaux.

Votre journal a une longue histoire, et son intention est d'embrasser toute l'Italie, pour les événements sportifs qui la concernent à l'intérieur de ses frontières et à l'étranger : le sport est l'un des facteurs qui nous font sentir comme un seul peuple, comme lorsque nous nous levons pour chanter l'hymne, à la maison, au stade ou dans les salles de sport. Combien il est important de marcher ensemble, de se sentir membre d'une même famille, et d'une famille de nations lors des Jeux olympiques ou des championnats mondiaux ou continentaux : ces dernières années, nous avons encore trop souvent vu des peuples voisins, ou des groupes au sein d'un même pays, se dresser les uns contre les autres, armés. La compétition sportive est saine, car elle demande de la patience, l'écoute de l'entraîneur, le respect de l'adversaire, des règles et des arbitres, la coordination avec ses coéquipiers : dans le monde, en revanche, l'objectif est souvent de détruire l'adversaire, de faire ses propres règles, de rejeter ceux qui veulent modérer l'affrontement entre les parties en fonction du droit international. Diffuser une culture sportive saine dans ce sens, c'est faire grandir l'humanité dans ses valeurs les plus belles et les plus authentiques, et je vous en remercie.

Bien que nous ayons malheureusement assisté ces dernières années à des épisodes d'intolérance, qui doivent être condamnés, je suis certain qu'il existe de nombreux autres exemples dans lesquels le sport a pu « faire équipe », sans que la race, la classe ou la confession religieuse ne soient des obstacles ou des barrières : je vous encourage à favoriser ce climat d'humanité authentique et accueillante. Nous devons rejeter toute logique d'exclusion et de violence, et pour cela nous savons que les mots ont leur valeur, pour éduquer au bien et au beau, plutôt que pour détruire. Un article de journal, même sportif, peut faire beaucoup de bien, mais il peut aussi nuire ou alimenter un climat de méfiance : ne soyez pas comme cela, s'il vous plaît !

En ce qui concerne l'hospitalité et la promotion humaine intégrale, il n'est pas possible d'organiser en même temps les Jeux olympiques et les Jeux paralympiques, ne serait-ce que pour des raisons d'organisation. Lors des dernières éditions à Paris, nous nous sommes réjouis des nombreux succès de garçons et de filles incroyables : pour certains d'entre eux, la médaille d'or a été vitale, car ils ont pu surmonter, grâce à leur force intérieure et à l'aide de tous, les défis posés par leur handicap. Leurs courses sont un hymne à la vie ! Que votre journal raconte des victoires et des défaites, mais qu'il soit une façon de penser et de vivre le sport comme un hymne à la vie !

Merci pour ce que vous êtes et ce que vous faites. N'oubliez pas de prier pour moi.

Rome, Saint Jean de Latran, 19 octobre 2024