PERE BRUNO SAUTEREAU : ARBITRE DE FOOTBALL
Prêtre et arbitre de
football, Bruno Sautereau fréquente autant les églises que les stades
de football. Son amour du sport répond à sa passion pour l'Evangile ...
Sa prière, source de dynamisme est comme un entraînement à aller plus
loin, toujours plus loin, dans la foi. Membre de la commission sport de
la pastorale des réalités du tourisme et du loisir il est intervenu
souvent à l'occasion de la Coupe du Monde en France ...
SES PRIERES
PRIERE POUR LA COUPE DU MONDE 1998
Seigneur, nous te confions cette coupe du monde !
Nous te prions pour les pays qui viendront
et pour ceux qui auraient voulu y être mais qui n'ont pu se qualifier.
Nous te confions tous les gens qui visiteront notre pays.
Nous te remettons toutes les passions humaines de ce Mondial :
pardon pour les mauvais gestes, les paroles blessantes, les attitudes violentes.
Mais par-dessus tout, Seigneur,
nous te remercions pour la joie qui naîtra des matchs, dans la victoire ou la défaite.
Que la gloire des hommes qui sortiront vainqueurs
ne fasse pas oublier que le plus important est d'être ensemble !
PRIERE D'UN ARBITRE DE FOOTBALL
Seigneur, Tout à l'heure, c'est le match !
Mon sac est prêt.
Dans la voiture en allant au stade, je me redis qu’il y aura du monde, mais aussi un gagnant et un perdant.
Le terrain est là, déjà les joueurs s'échauffent et la tribune se remplit.
Tirage au sort, choix du camp, sourires, coup d'envoi, c'est parti !
But marqué : joie pour les uns, tristesse pour les autres.
But refusé, but raté, rancune, colère, tacle appuyé, geste déplacé, injures,
carton jaune, attention ! Carton rouge, on n'avait pas le droit ! Qu'importe, la partie dure 90 minutes !
Poignée de main du perdant, récompense, respect, estime, merci Seigneur,
pour cet après-midi passée ou passion, sport, amitié peuvent se rejoindre. Merci pour
les rencontres humaines que tu aimais tant et qui sont les nôtres.
Merci pour le don de la patience, de l'amitié et du partage donnés par un ballon.
SES INTERVIEWS
NOUS AVONS NOTRE PLACE !
interview réalisée par Laurent Larcher ( Famille
Chrétienne )
Comment l'idée de devenir arbitre vous est-elle venue ?
J'ai toujours aimé le sport : l'athlétisme et le football en particulier.
Junior, je jouais dans l'équipe de Melun en D2. En 1990, on m'a proposé de devenir arbitre.
C'étais pour moi l'occasion de fréquenter le stade d'une autre manière.
Aujourd'hui, je suis arbitre régional pour la FFF.
Etes-vous bien accepté ?
Oui. Bien sûr, il y a encore quelques sourires ironiques. Mais dans l'ensemble, je suis bien intégré.
La preuve étant que l'on m'a décerné, deux années consécutives, le prix du fair-play pour le département.
Avec quelques uns, nous avons mis en avant la notion du fair-play, du beau geste.
Cela a plu dans le monde des arbitres, et dans le monde du foot en général.
Le fair-play est-il si absent de ce milieu ?
Oui ! Le football est devenu pour beaucoup trop important.
Dans le milieu amateur chaque match se vit comme une finale de coupe du monde.
La victoire prime sur le plaisir de jouer.
Il n'y a pas un match sans problème : c'est toujours la faute de l'arbitre s'il y a un perdant.
Le foot est-il un sport à part ?
C'est le sport universelle. Il est pratiqué dans le monde entier.
D'autre part, c'est le sport populaire par excellence :
il touche en premier lieu les couches les plus populaires de la société.
Il est à la merci de ses adeptes.
Si ces derniers n'ont pas le respect des institutions, des règles, cela se retourne dans leur sport.
A la fois chez celui qui joue et chez celui qui supporte.
Le supporter de football se tient souvent très mal : injures, bagarres, chauvinisme.
Le succès du football ne s'explique-t-il pas aussi parce qu'il est pour beaucoup
l'un des derniers lieux de sociabilité et d'identité ?
Oui, certainement. Le quartier, la ville, la classe d'âge, la profession, la nation ...
d'où les débordements de type chauviniste.
On projette dans le foot tout ce que l'on a pas ailleurs.
La publicité joue beaucoup dans ce phénomène :
porter le même maillot, les mêmes marques, les mêmes chaussures que son équipe ...
contribue à ce sentiment identitaire.
En revanche c'est le lieu des grandes amitiés et des grandes émotions.
Les grands joueurs de football sont perçus souvent comme des idoles :
hier, Pelé et Maradona, aujourd'hui : Ronaldo ... Que pensez-vous de ce phénomène ?
C'est grave, surtout quand l'idole est un tricheur ou un violent.
C'est la fameuse main de Maradona, le coup de pied de Cantona, le joint de Lama ...
Qu'est-ce que j'entends sur les terrains de foot, après ces scandales :
Pourquoi c'est mal, puisque les grands le font ?
Quel est votre plus beau souvenir d'arbitre ?
La poignée de main, à la fin du match, de toute l'équipe vaincue. C'est arrivé une seule fois !
Le Mondial représente-t-il un enjeu pour l'Eglise ?
Le défi, pour l'Eglise, c'est l'accueil : sera-t-elle capable, comme elle l'a si bien fait pour les JMJ,
d'accueillir les visiteurs qui seront à la fois des supporters, des touristes et des pèlerins ?
Supporters, puisqu'ils viennent d'abord soutenir leur équipe.
Touristes, puisque les visiteurs passeront en moyenne une semaine en France.
Pèlerins, puisque la plupart des équipes qualifiées représentent des pays chrétiens ...
Que proposez-vous ?
Dans chacun des dix sites de la Coupe du monde,
nous nous sommes efforcés d'organiser des célébrations religieuses en différentes langues.
Nous avons mis l'accent sur l'ouverture des églises aux abords des stades.
Nous animerons pendant le mondial, des débats sur le sport et l'argent, sport et violence ...
Vu de l'extérieur, l'Eglise semble peu mobilisée.
Comment expliquez-vous cette relative indifférence ?
C'est vrai. Je crois que cela tient au fait que ce n'est pas un évènement que l'Eglise organise.
N'est-ce pas un effet boomerang de la laïcité à la française ?
Nous n'avons pas tous conscience que nous avons notre place dans l'organisation du Mondial,
et dans le monde du sport et du loisir en général.
Par exemple, nous avons le droit d'apporter notre réflexion sur le développement de l'homme :
à la fois corps, intellect et esprit.
Si l'on oublie l'une des trois dimensions, on passe à côté ...
Ce qui arrive trop souvent dans le monde sportif.
JE COURS VERS LE BUT ...
article réalisé par Christine Florence ( Prier )
Il court, il court, Bruno Sautereau, sur l'herbe verte des stades de foot.
Il les parcourt en long et en large, en suivant la trajectoire du ballon que les joueurs se disputent.
Sa fonction : arbitre, celui qui veille scrupuleusement au respect des règles
pour rendre la justice, le cas échéant.
Mais ce grand gaillard de 36 ans n'a rien d'un juge austère.
Ce fou du foot, volubile et plein d'entrain, a aussi une autre vocation : il est prêtre.
Ce désir là lui est venu à l'âge de 12 ans. Et il a bien du mal à l'expliquer.
Désir de donner sa vie, de se dépasser sans cesse et d'aller vers les autres. L'enfant aimait l'Eglise.
La foi représentait, à ses yeux, un défi constant pour aller plus loin dans l'amour du prochain.
Bien entendu, si j'ai lu l'Evangile, si j'ai découvert la prière,
c'est grâce aux croyants et à ma famille, observe-t-il.
Mais sa vocation de prêtre vient peut-être plus de ses contacts avec des personnes ( éducateurs, entraîneurs )
qui étaient en dehors de l'Eglise et qui lui ont dit : Tu vas jusqu'au bout de toi-même.
Et c'est vrai. Le gamin s'est forgé des muscles et une personnalité grâce à ce jusqu'au bout là.
A 8 ans, passionné d'athlétisme, il courait déjà dans sa banlieue de Seine-et-Marne,
à Dammarie-les-Lys pour aller toujours plus vite, être toujours devant.
Et puis le football lui a aussi enseigné la vie d'équipe
et comment une bande d'adolescents bien entraînés peuvent être sélectionnés en Coupe de France.
Aujourd'hui, Bruno est prêtre à Marne-la-Vallée, auprès d'une population jeune et cosmopolite.
Faute d'être joueur, car cela lui prenait trop de temps, il est arbitre,
depuis 6 ans, en Ile-de-France, sous l'égide de la Fédération Française de Football.
Sur sa passion, le sport en général, Bruno est intarissable.
S'il le pouvait, il vous emmènerait voir un matche de foot ou courir, avec lui, les 42 km du marathon.
Il vibre, s'enthousiasme, s'émerveille ... on s'y croirait.
La prière semble omniprésente dans sa vie.
Il raconte : le voici par exemple en train de courir le marathon dans Paris.
Pendant les 30 premiers kilomètres, tout va bien. Mais ensuite l'effort commence à se faire sentir.
Souffrance physique du sportif qui atteint là un seuil de tolérance.
C'est le moment où les courent désirent de toutes leurs forces
non pas remporter la course, mais simplement avoir le courage, la volonté, la persévérance d'aller jusqu'au bout.
COUPE DU MONDE 1998 ...
article réalisé par Frédéric Mounier ( La Croix,
16/06/98 )
Frédéric Mounier : P. Sautereau, vous exercez votre ministère
presbytéral en Seine-et-Marne. Vous êtes aussi responsable de la
commission sport de la Pastorale du tourisme et des loisirs. Un prêtre
n'est-il pas destiné à être l'arbitre d'une communauté ? Et l'arbitre
ne doit-il pas promouvoir les valeurs évangéliques sur le terrain ?
P. Bruno Sautereau : Le dimanche matin, je suis prêtre, et
l'après-midi, j'arbitre sur les terrains de l'île-de-France, envoyé par
la Fédération française de football. Chaque week-end, 40 000 matches se
déroulent ainsi en France. Chacun des 20 000 arbitres est confronté
régulièrement à la violence. Elle commence toujours par des mots,
parfois des coups, voire plus... On doit gérer à la fois des joueurs,
des dirigeants, les supporteurs...
_ Difficile, les supporteurs ?
_ Oui, parce que l'arbitre est forcément le plus mauvais du monde ! Nous sommes ainsi au centre d'un conflit et d'un jeu.
_ Ce conflit doit être aussi un jeu...
_ Cela reste un jeu. Mais, pour ceux qui y participent, ce n'est pas forcément le cas.
_ Comment faites-vous pour lutter contre la violence ?
_ On fait ce qu'on peut. On essaie d'être présent dans les équipes, de
faire en sorte que le match aille jusqu'au bout. Après le match, on
essaie toujours de dialoguer, de discuter. Ce n'est pas évident, il
faut beaucoup s'expliquer. Nous sommes solidaires des campagnes qui
auront lieu durant tout le Mondial. A chaque début de match, un grand
drapeau jaune, au milieu du terrain, invite les grandes stars du foot à
montrer le bon exemple.
_ Le Stade de France est à quelques pas de la basilique de Saint-Denis.
L'Eglise est présente au sein de cette Coupe du monde : la Pastorale du
tourisme propose des initiatives...
_ Dans les dix villes participantes (Marseille, Montpellier, Toulouse,
Lyon, Saint Etienne, Bordeaux, Nantes, Paris, Saint-Denis, Lens), nous
accueillons les supporters, croyants ou non. Des espaces de silence
sont ouverts dans les églises. Ils sont également ouverts au dialogue
inter-religieux.
_ Les supporteurs pourront prier pour leur équipe ?
_ Ils peuvent le faire, mais je ne pense pas que Dieu soit pour les
vaincus ou les vainqueurs. Nous avons voulu être sensibles à la
démarche du croyant que peut être chaque supporteur. A Nantes, une
réflexion est proposée sur le fair-play. On évoquera le développement
de tout l'homme : corps, esprit, intellect.
_ Il y a aussi des initiatives envers les plus jeunes...
_ Ce sera le « Mini-Mondial ». A Franconville (Val-d'Oise), du 6 au 13
juillet, des chrétiens rassembleront 250 jeunes. Ils joueront au
football l'après-midi, et le matin ils réfléchiront, vivront des temps
de prière ensemble.