Retour

TEMOIGNAGE DE SPORTIF DE HAUT NIVEAU
MATHIEU THUNER

               Se prendre pour le king du ciel !

Fasciné par le parapente depuis toujours, Mathieu Thuner a risqué sa vie de nombreuses fois. Il témoigne avoir été gardé en vie par pure grâce ...

Tout gamin, j'étais déjà gravement fasciné par le parapente ! Les années d'attente ont été interminables avant d'avoir l'âge légal ( ou presque ... ) pour pouvoir enfin commencer. J'ai patienté tant bien que mal en lisant des milliers de pages de bouquins et de magazines sur le sujet, et en allant très souvent voir les parapentistes décoller ou atterrir. Je m'étais même fabriqué un parapente en sacs poubelles de 110 litres, avec lequel j'ai réussi à voler quelques mètres ! J'ai 15 ans quand une connaissance me donne un vieux parapente. Purée ! Mes premiers vols ! Seul, sans l'ombre ni d'un instructeur, ni d'une quelconque légalité et encore moins d'une miette de prudence ... Du pur bonheur !

L'aile qui ne pardonne rien

J'ai ensuite rapidement passé le brevet de parapentiste  Leysin en Suisse. Puis, bien qu'étant encore parfaitement novice, j'ai acheté une aile qu'un débutant n'a jamais à acheter : une aile pour compétitieur ! Le genre d'aile délicate qui ne pardonne rien et qui laissera volontiers son pilote s'écraser au sol, sans pitié, à la moindre faute de pilotage !

Mais j'étais certain d'être le King du ciel ! Mes ambitions étaient de devenir multiple champion du monde, rien de moins. J'étais trop orgueilleux, tout en donnant l'impression d'être modeste : intérieurement, je ne pouvais que piétiner ceux qui se trouvaient au dessu de moi. Complètement aveuglé par mon ego, ou sans doute habité d'un mal-être profond, j'ai joué ma vie sur plus d'un vol. J'ai ainsi tenté des essais de nouvelles acrobaties sans parachute de secours, des vols dans des conditions météorologiques juste suicidaires, des compétitions sans voir les virages, des passages hyper à ras le sol pour épater la galerie et j'en passe. Je suis aujourd'hui stupéfait d'être en vie. Avec maintenant plus de 20 ans de parapente derrière moi, je n'ose plus faire un dixième de ce que je faisais avant : voler par temps d'orage et me trouver à deux doigts de me faire inéluctablement aspirer ; voler dans de gros cumulus pour profiter d'ascendances jusqu'à plus de 5000 m d'altitude alors que le givre commence à faire vibrer mon aile ; et encore moins vouloir inventer une nouvelle figure sans deuxième chance et finir en torche, mais par grâce dans un arbre en lisière de forêt !

Le miracle d'être en vie

Je me souviens avoir dû tirer mon parachute se secours plusieurs fois, dont une où il ne s'est ouvert qu'une fraction de second avant l'impact ! Ou avoir engagé aussi des spirales trop longtemps, au point de voir la ligne électrique du train juste devant moi. Il y a eu trops de situations où j'aurais dû me fracasser comme un sac. Le miracle est que je suis en parfaite santé aujourd'hui. seul mon orgueil a été sérieusement blessé, et ant mieux. Je remercie Celui qui - je le sais maintenant - à chaque jour merveilleusement veillé sur moi, et qui continue à le faire. Et je reste surpris de voir que le parapente, qui était pourtant tout ma vie, me paraît si fade aujourd'hui. Vous ne trouvez pas que les sports les plus magnifiques de la planète ne sont que des amusements, aussi bons soient-ils ?

tiré de : La bible de la montagne